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L’HAITIZ de tous les possibles la plus belle des radios
Jho aujourd’hui fait figure du plus grand inconnu des stars sacrées de la musique haïtienne, par la génération actuelle. Et pourtant, il est passé parmi les tous premiers à disséminer la musique indigène haïtienne à travers le monde. A une époque où elle fut ostracisée même au bercail. Dans un milieu où la musique de cabarets reste la chasse gardée de tous les musiciens, Archer a dès le début de sa carrière choisi d’être artiste de récital. Né avec le rythme et la musique dans les veines, il s’est initié dès l’adolescence à la danse sous les commandes de l’indécrottable Lavina Williams qui en a fait un vrai prodige de la danse; tout en l’inculquant des dessous du folklore local. Subséquemment, il est repéré à la section d’art dramatique à l’Institut français. A la fin des années 1950, il reçut ses premières bourses d’études pour l’Europe, puis les Etats-Unis où il est admis à l’international Dance School dont il devient un professeur chevronné de la danse moderne.
Un cheminement qui a permis à Jho de se faire de bonnes connections dans les milieux du show au state. Et, éventuellement une plateforme pour mettre en valeur la musique de ses origines. En 1962 il fait un début tonitruant au Carnegie Hall où il fait un tollé de par son style flamboyant et sa musique distinguée. Ce qui l’a mis dans le collimateur des grandes compagnies comme Epic et Columbia Records. Pionnier avéré de la musique alternative, il s’est fait une mission d’unir les cultures à un moment où le thème vodou-jazz était peu usité. Et c’est tout qui a fait de Jho un contributeur de poids dans son obsession de le mettre à la portée du public d’outre-mer, en s’installant à l’avant-garde d’un genre inédit à travers les morceaux: Sobo de Justin Lamothe, Nan fon bwa, Mèsi Bondye de Casséus, Elou de Jaegerhuber, Ti zwazo de M. Monton; de même que: Fèy, Tinini, Shango, Kannon tire etc; auxquels il a injecté ses propres adaptations leur permettant de résister au temps.
En fait, un vrai innovateur des classiques locaux ainsi que des pièces traditionnelles qu’il a épurées de leur folklorisme, en les imbibant de modernité sous sa signature. Spécialement accompagné de musiciens chevronnés, il a prouvé qu’il était le pourvoyeur d’un genre inexploré; pratiquant le métissage entre le jazz et les rythmes du vodou imprégnés de multiples fusions. Apportant dans la foulée une approche planétaire aux paramètres haïtiens; leur évitant toute extinction. Il s’est imposé en ce sens comme un super innovateur des traditions négligées du terroir natal. Cependant, au delà de tout, Archer était un superbe show-man, un monstre indomptable de la scène, un danseur extraordinaire, un chorégraphe qualifié. Sa présence scénique et son showmanship qui avaient à l’époque fait des planches un voyage égocentrique, comme les Elvis, James Brown, Claude François, Mick Jagger, Sylvie Vartan etc;. Pas étonnant qu’il ait toujours évolué dans des endroits rompus de professionnalisme et de savoir-faire
Malgré une voix peu résonnante et un registre limité, ce qui fut son talon d’Achilles, Jho s’est quand même armé de multiples arguments pour que le spectacle soit toujours à son paroxysme. Toujours aux U.S.A, il s’est permis de tâter la chanson anglaise dans des ritournelles peu convaincantes, telles: Natural woman (prouvant aussi qu’il fut en avance des LGBTQ), Summertime, Batucada, Sweet Caroline, But I cant get back etc. Tout en réalisant combien une carrière à l’américaine serait un pis-aller, il mit le cap pour la France à la fin des années 1960 pour prendre part au Festival des Nation, à la recherche d’un second souffle. A Paris, il ne lui a pas pris du temps pour s’imposer, en se montrant en artiste de variétés dans des chansons comme: La petite maison (celle là a bien bercé mon adolescence), Je ne peux pas nager (Tu l’as avoué toi-même Jho), Le bongo du bon gars de Gabon, A St. Germain, Les pêcheurs de Port-de-Paix, Adieu sans adieux, Tante Sylvie, Si tu changes d’avis, La première à savoir, Pa sou sa, En plein dans le mille etc.
Autant de tubes qui lui donnent droit à l’affection du public francophone et de ses pairs, mais peu connus au pays. Au music hall français, Archer s’est propulsé dans des shows spectaculaires et ses costumes excentriques qui en firent l’ultime showman. Fort de ses succès, il en profite pour faire un tour au bercail au début des années 1970. Durant sa première performance au Rex Théatre, il s’est assimilé à un fils de l’hexagone en déclarant : « Chez nous en France… », pour filer ensuite à l’anglaise vers d’autres pôles. Eventuellement, il est resté attaché à sa culture, continuant à produire des œuvres de référence locale telle Anita, un succès dense. Nadia, Vodou time, Vodou jazz etc. Se plaçant dans cette lignée dans la genèse du mouvement rasin, en exposant les vibrations ataviques du vodou dans les grands temples exclusifs du monde. Sans oublier des hits comme: Africa et Creuser la terre qui ont été des contributions à la lutte contre l’Apartheid. A ce périple, il visite Haïti pour se ressourcer dans une carrière qui avait commencé à prendre de l’eau. C’est ainsi que dans le show inaugural au Ciné Triomphe, il s’est permis de faire « Baby doc » alors dictateur de l’ile dans la salle, déconner de sa voix nasale le morceau Choucoune.
Eventuellement, sa tournée haïtienne l’a emmené au Stade Sylvio Cator dans un festival à tout casser en compagnie de Jhonny Pacheco, Jhonny Ventura, Les Frères Déjean, Scorpio etc. Il en a profité pour honorer divers artistes avec des distinctions-Cartor, Occide Jeanty etc. Tout en exhortant l’environnement musical à honorer les devanciers tels: Nemours, Sicot, Guillaume et tant d’autres qui ont jalonné la musique haïtienne de leurs œuvres et talent. Cette tournée nationale reste le dernier baroud d’honneur pour Jho au pays. On l’a encore revu de façon sporadique dans quelques shows de la diaspora au début des années 1980 au Brooklyn College sous la commande de Firmin Joseph, avant de disparaitre dans la pénombre. Pourtant, les amants du spectacle évoquaient toujours l’école Jho-Archer dans un domaine où il y avait un manque à gagner du show ; avec peu de concurrents. A chaque fois qu’on s’attendait à un « comeback » de Jho, c’était pour se rendre compte qu’il en avait assez de tout pour aller finalement se terrer dans un coin de France. Pour s’enfouir, se faire oublier et cesser d’exister…
Written by: Rédaction
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